October 2014 /237

La victime à l’étude

Un nouveau certificat universitaire unique en Belgique francophone

Branche à part entière de la criminologie, la victimologie reste cependant une discipline relativement jeune. Ce n’est qu’au lendemain de la Seconde Guerre mondiale que les souffrances des victimes de violence suscitent pour la première fois un réel intérêt du monde médical. On s’intéresse enfin à elles en tant qu’objet social, tout en interrogeant différents aspects liés à leur statut comme les dimensions juridique, sociologique ou psychologique.

Dépasser les clivages

Rapidement, deux grands courants vont se dessiner avec des différences idéologiques flagrantes. D’un côté, les Anglo-Saxons adoptent une approche plus criminologique en questionnant la place de la victime et surtout son implication dans le fait criminel. De l’autre, les Européens et particulièrement les Français, suite notamment à l’émergence des grands mouvements féministes, adoptent une victimologie humanitaire en développant des groupements d’associations militantes d’aide aux victimes et en insistant sur leur réhabilitation et leur guérison.

GarcetSerge« On voyait ainsi s’opposer une démarche plus scientifique, avec ses erreurs et excès, et une démarche plus militante et morale, note Serge Garcet, chargé de cours au département de criminologie et promoteur du certificat en victimologie clinique. Et pendant de nombreuses années, les recherches dans le secteur n’ont pas pu dépasser certains clivages. Or, dans une approche résolument universitaire, on doit pouvoir transcender certaines orientations idéologiques afin d’aborder cette problématique comme un véritable objet d’étude, au même titre que d’autres pans de la criminologie. On doit pouvoir l’approcher dans toutes ses dimensions, qu’elles soient juridiques, psychologiques, médicales, légales, etc. »

Au sens strict, la victimologie s’occupe des victimes de délits ou de crimes, de leur statut psycho-social et de leurs éventuelles relations avec les agresseurs. Mais elle conduit également à explorer d’autres pistes comme ce qui peut prédisposer, par exemple, certaines personnes à devenir des victimes, comme une singularité dans la personnalité, dans des comportements ou des mises en situation de danger potentiel. La victimologie entend également promouvoir le travail en réseau entre les différents intervenants agissant en première ligne : le personnel hospitalier, associatif et judiciaire.

Une formation transversale

Dans cette optique, le département de criminologie de l’ULg lance un nouveau certificat en victimologie clinique. Depuis le mois d’octobre, la formation propose 90 heures de cours théoriques ainsi que 30 heures consacrées à un travail intégratif et transdisciplinaire. Le certificat a pour objectif de développer une maîtrise des connaissances dans les problématiques spécifiques de l’assistance aux victimes. « Il s’agit avant tout de proposer un panel de cours et d’enseignements dans une démarche transversale qui dépasse le caractère parfois trop spécifique des formations, développe Serge Garcet. En s’adressant à un public professionnel dans une approche interdisciplinaire, on peut mieux démontrer que la victime n’est pas un concept neutre et lancer des ponts entre les différents métiers concernés. »

La société actuelle tend à accorder plus de reconnaissance et de soutien aux victimes d’actes de violence. La législation évolue, en prenant mieux en compte leur place dans les procédures pénales et civiles, non sans parfois susciter quelques débats. Globalement, si la souffrance de la victime est mieux comprise et encadrée, son image sociale demeure complexe. Il est dès lors indispensable que les intervenants soient convenablement formés à la complexité individuelle et sociétale de l’approche victimologique, en maîtrisant les aspects singuliers de la souffrance, du traumatisme et de la reconstruction psychologique et sociale.

Le programme s’adresse aux criminologues, psychologues, avocats, magistrats, policiers, travailleurs sociaux, médecins, titulaires d’un diplôme de l’enseignement universitaire et de l’enseignement supérieur de type court moyennant deux années d’expérience. Les candidats ne répondant pas à ces profils peuvent néanmoins avoir accès àla formation sur base d’une valorisation des acquis de l’expérience de cinq années minimum.

François Colmant

Tél. 04.366.91.07, courriels formation.continue@ulg.ac.be et serge.garcet@ulg.ac.be

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