Novembre 2014 /238

Sans chimie

Les thérapies ne sont pas toutes accompagnées de médication.

RenardAudreyLe 15e jour du mois : En quelques mots, qu’est ce que l’hippothérapie ?

Audrey Renard : C’est une thérapie qui utilise le cheval comme média et partenaire. Nous accueillons des bénéficiaires (dès l’âge de 2,5 ans) pour des raisons très variées : troubles moteurs et physiques, retards mentaux, troubles sensoriels, troubles d’apprentissage ou du développement, etc. Au sein de l’ASBL Hippopassion, 80% de nos occupations sont des accompagnements psycho-éducatifs et de rééducation. Nous nous adaptons aux besoins de chaque bénéficiaire et nous montons un projet avec des objectifs individualisés pour chacun.

Le 15e jour : Quel type de travail faites-vous ?

A.R : Nous travaillons de diverses façons : à côté du cheval – dans son box, en liberté ou à la corde – ou sur le cheval, ce qui est très motivant. On peut aussi utiliser l’attelage. Il y a vraiment une multitude de possibilités. Pour les personnes atteintes de troubles moteurs, par exemple, le fait d’être assis sur le cheval va permettre de travailler pas mal de choses au niveau du tonus, de l’équilibre, de la coordination et de la dissociation des mouvements. Cette thérapie a aussi l’avantage de mettre tous les sens en éveil, dans un cadre démédicalisé, lié à la nature. Pour certains, c’est aussi une source de valorisation car tout le monde ne monte pas à cheval. Cela donne une autre place ou un autre point de vue, notamment à ceux qui sont en chaise roulante.

Le 15e jour : Psychologiquement, comment le cheval peut-il aider les personnes en difficulté ?

A.R : Le cheval peut aider les enfants et les adultes qui ont un problème de socialisation à prendre conscience de leur corps et à l’utiliser comme un moyen d’expression. Il permet de travailler leur communication non verbale et de l’adapter en fonction des interactions. Le cheval répond de manière cohérente, sans jugement. Il sent l’intention et l’humeur du bénéficiaire et va répondre sans intellectualiser. Cela nous permet de mettre en évidence ce que les personnes dégagent et de travailler cela en vue d’une meilleure socialisation et d’une meilleure affirmation de soi.

Le 15e jour : Depuis le mois de septembre, vous collaborez avec l’ULg…

A.R : Oui, nos plannings à Fraiture en Condroz étaient saturés et nous étions à la recherche d’un endroit afin de proposer de nouvelles plages horaires. Mais les sites pouvant accueillir des personnes en difficulté et des chevaux dans de bonnes conditions sont rares et bien souvent très coûteux. Notre collaboration avec la faculté de Médecine vétérinaire nous permet de proposer une alternative et de créer de nouvelles synergies avec des professeurs et étudiants vétérinaires, psychologues et kinésithérapeutes. Cette collaboration est aussi un pas vers la reconnaissance de notre métier dans le milieu académique. L’ULg nous apporte les ressources matérielles et nous mettons notre expertise à la disposition d’étudiants stagiaires et de mémorants. Concrètement, il y a deux chevaux de l’ASBL et deux chevaux de l’écurie liés aux travaux didactiques des étudiants vétérinaires qui participent aux séances données sur le site du Sart-Tilman par quatre membres d’Hippopassion.

Informations sur le site www.hippopassion.be

DierickxChristopheLe 15e jour du mois : Comment est née la thérapie basée sur la “pleine conscience” ?

Christophe Dierickx : C’est une pratique apparue dans les années 70, initiée par Jon Kabat-Zinn aux Etats-Unis. Etudiant dans le Massachusetts, il donnait des cours de yoga pour payer ses études de biologie moléculaire et un de ses amis donnait des cours de méditation vipassana avec laquelle on apprend à “voir les choses telles qu’elles sont”. Ensemble, ils ont décidé de réunir ces deux pratiques, mais en supprimant leurs aspects religieux. Aujourd’hui, des centaines de personnes qui ont suivi son enseignement aux Etats-Unis pratiquent et transmettent la pleine conscience un peu partout dans le monde. Le premier programme mis au point par Jon Kabat-Zinn vise la réduction du stress (MBSR). De ce programme sont nées de nouvelles pratiques comme la thérapie cognitive basée sur la pleine conscience pour la dépression (MBCT) et la thérapie d’acceptation et d’engagement (ACT). La première a pour objectif de prévenir la rechute dépressive assez fréquente et la seconde aide les gens à vivre davantage en accord avec leurs valeurs et à atteindre leurs objectifs de vie.

Le 15e jour : En quoi consistent les séances ?

C.D : La pleine conscience est un état de conscience qui consiste à diriger son attention, de manière intentionnelle et sans jugement, sur l’expérience qui se déploie, moment après moment tant au niveau de la pensée que des émotions ou des sensations physiques. Elle est enseignée sous différents formats. Pour la MBSR et la MBCT, le programme en groupe s’étale sur huit séances de deux heures et demie, avec une journée supplémentaire en silence pour la MBSR. Nous faisons des exercices de type méditatif, parfois accompagnés d’exercices de yoga accessibles à tous. Les participants sont également invités à réaliser des exercices en dehors de ces séances afin de pouvoir appliquer la pleine conscience au quotidien. Pour la thérapie ACT, nous la proposons à l’ULg sous la forme d’une formation en trois séances de trois heures. La pleine conscience peut aussi s’apprendre en séance individuelle.

Le 15e jour : Vous contribuez à la recherche sur ce sujet à l’ULg…

C.D : Je propose les deux programmes (MBSR et MBCT) et la formation ACT au sein de la CPLU . Les groupes que je forme contribuent aux recherches grâce aux réponses des participants à un questionnaire avant et après. Nous travaillons notamment sur un projet de pleine conscience pour enfants et adolescents. Avant le début de chaque programme, je demande aux participants d’assister à une séance d’information obligatoire afin de leur expliquer le déroulement du programme et de m’assurer qu’ils sont dans de bonnes conditions pour le suivre. Car il ne faut pas être au creux de la vague pour commencer ce type de thérapie. Surtout en ce qui concerne les programmes MBSR et MBCT. Pour participer, il faut avoir un minimum de capacité d’attention, ce qui est difficile lorsqu’on se sent envahi par les problèmes.

Le 15e jour : Avez-vous des exemples où la pleine conscience a aidé ?

C.D : Il y a beaucoup d’exemples. Je me souviens notamment de personnes qui ont retrouvé le sommeil ou qui ont refait des choses qu’elles ne faisaient plus depuis longtemps. Une personne en particulier m’a dit que cela l’avait aidée à avoir le courage de dire “non” à son employeur. Les résultats sont parfois surprenants. Une dame qui avait une jambe paralysée m’a dit ressentir des choses dans la pointe des pieds lors de certains exercices…

Informations sur le site www.fapse.ulg.ac.be

Propos recueillis par Audrey Binet
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