Décembre 2014 /239

Case-tête

Le mind mapping, outil visuel performant

« Comment apprendre son cours rapidement, sans fournir d’efforts, en trois étapes”, voilà une promesse alléchante pour tout étudiant optant trop souvent pour le mauvais embranchement, lorsqu’il est confronté à la dichotomie récurrente entre le travail et la dolce vita. “Obtenez les meilleures notes avec un minimum d’effort...”, avancent même certains attrape-clics sur internet. Mais existe-t-il de véritables méthodes alternatives ou plus efficaces pour éviter l’ingestion linéaire de sa matière, en dehors du mythe évoquant le fait de laisser tourner sur des baffles son cours enregistré, pour mémoriser pendant la nuit ?

Structuration de la pensée

MindMappingL’une des réponses qui ressurgit à l’heure actuelle, alors que sa genèse est ancrée dans les années 70, s’appelle le mind mapping. Le concept consiste à cartographier ses idées, des points précis ou des chapitres dans des schémas colorés, tout en établissant des liens hiérarchiques et transversaux entre ces éléments, à différents niveaux. De prime abord, cela permet d’avoir une vision panoptique de sa matière. Mais ce n’est pas tout, comme l’explique Patricia Schillings, chargée de cours en sciences de l’éducation : « Tout ce qui est rationnel et linéaire relève de l’hémisphère gauche du cerveau (et a tendance à rassurer, ndlr). L’idée, c’est que l’on va miser sur la visualisation de l’ensemble et sur l’organisation. Au départ d’un élément central, on accroche des idées secondaires sous forme de branches, des dessins ou des symboles. » Cela relève de l’hémisphère droit, dans un fonctionnement plus visuel et par association, mais reste aussi plus déstabilisant dans une certaine appréhension de la nouveauté. « Lorsque l’on a été longtemps habitué à une structure d’apprentissage linéaire, c’est difficile d’en changer. Pourtant, pour bien apprendre, il faut comprendre l’information et pour mieux la comprendre, il faut la structurer. Le mind mapping permet d’accrocher les connaissances du texte à ses connaissances préalables et de créer sa propre organisation pour structurer plus efficacement et mieux apprendre. »

C’est, selon Ausubel (et les constructivistes) – psychologue américain disciple de Piaget et premier explorateur des cartes cognitives –, l’essence même de l’apprentissage. Par ailleurs, la création de cartes mentales pendant que l’on étudie permet de réaliser une lecture active (dans laquelle l’étudiant est cognitivement engagé) favorisant un apprentissage en profondeur et pas seulement en surface. La notion de cartes mentales a été déployée par Tony Buzan, un psychologue anglais qui s’est érigé en pape du mind mapping. Ce dernier est d’ailleurs devenu le gourou d’Emile Detaille, étudiante en santé publique. Empêchée d’écrire pendant son blocus à cause d’un problème à la main, elle s’est convertie aux cartes visuelles en question pour s’épargner les kilomètres de phrases de résumé. « J’ai utilisé le logiciel de mind map automatique qu’est XMind. Du coup, j’ai appris à étudier autrement sur mon ordinateur, d’une manière plus structurée en fait. Un peu comme si je tricotais une écharpe, en avançant petit à petit dans la connaissance, aime-t-elle expliquer. Et cela fonctionne mieux, aussi, lorsqu’il s’agit de vérifier que l’on sait bien restituer la matière. Le fait de visualiser le nombre de branches pousse à ne rien oublier et à tester un peu partout dans la carte, tout en conservant une vision d’ensemble. »

Carte conceptuelle

Mais il y a plus fort que le mind mapping. « Une variante encore plus intéressante d’un point de vue pédagogique est constituée des cartes conceptuelles – heuristiques – développées par Joseph Novak, dans lesquelles les liens entre concepts sont sémantiquement définis. Par exemple : appartient à, signifie, comprend, est plus petit que, fait partie de, se subdivise en… Passer de la carte mentale du mind mapping à la carte conceptuelle est une manoeuvre plus complexe, mais qui permet d’optimiser davantage l’apprentissage en profondeur et la mémorisation », détaille Pascal Detroz, chargé de cours à l’Ifres, qui précise également que les cartes mentales et cartes conceptutelles sont aussi des outils très intéressants à l’usage des enseignants pour montrer notamment, les relations parfois très complexes entre concepts abordés au cours qui, sans cela, seraient vus d’une manière isolée ou d’une manière linéaire. CmapTools, gratuit sur le web, permet aussi d’avancer d’une manière progressive.

Si les Anglo-Saxons sont plus avancés que nous dans les “graphic organizers”, il semble que le principe du mind mapping commence à percoler dans nos habitudes en revisitant la traditionnelle présentation “PowerPoint”. Le logiciel Prezi, qui a de plus en plus la cote dans les sphères académiques et de l’entreprise, permet en effet de créer des présentations “zoomantes” et de prendre goût au principe de la cartographie mentale.

Fabrice Terlonge
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