January 2015 /240

A l’écoute du corps

Fin janvier, une université d’hiver ouverte à tous

Après deux universités d’été, l’une sur “Femmes et livres” en 2003 et l’autre sur “Femmes et mobilité” en 2007, le groupe “Femmes, enseignement, recherche à l’ULg” (FER ULg) propose, en collaboration avec l’Embarcadère du savoir, une université d’hiver sur le thème “Femmes et santé”, du 27 au 31 au janvier.

« Les mentalités changent, les manifestations se succèdent, et force est de constater que des droits parfois péniblement acquis sont dorénavant remis en question. Une de nos ambitions est d’analyser les lignes de forces qui se dégagent de ces dérives et de leurs enjeux, explique le Pr honoraire Juliette Dor, responsable scientifique du FER ULg. Je pense à la prostitution, au harcèlement, à la contraception, à l’avortement, ou encore à la procréation assistée. Mais le colloque évoquera aussi l’accès à la profession, la médecine préventive, le sport, etc. »

Choeur de femmes

Fidèle à sa vocation de jumeler recherche et enseignement, le FER ULg a invité des chercheurs du monde francophone à une rencontre scientifique couplée à une université d’hiver au cours de laquelle les étudiants, doctorants, associations et personnes intéressées pourront rencontrer des spécialistes chevronnés. La manifestation déclinera huit thèmes de réflexion, de l’image du corps de la femme aux blessures physiques et psychologiques subies, en passant par la “santé positive”. Un programme très dense qui n’oublie jamais de laisser place à la discussion.

WincklerMartinLe colloque débutera par une conférence de Martin Winkler, médecin généraliste et auteur du Choeur des femmes, grand succès de librairie. Martine Jaminon, administratrice déléguée de l’Embarcadère du savoir et membre du comité organisateur, avoue avoir eu un “véritable coup de coeur” pour son roman. Martin Winkler est « un homme qui cherche vraiment à comprendre les femmes, à se mettre à leur place » et c’est pour cela que sa présence illustre à merveille l’esprit du colloque. « Au travers du Choeur des femmes, on retrouve l’idée fondamentale selon laquelle les femmes sont actrices de leur santé. La notion d’écoute est aussi très importante et très présente. » L’histoire confronte deux personnages principaux, une jeune interne ambitieuse qui se destine à la chirurgie gynécologique et qui ne souhaite pas perdre son temps à “tenir la main des patientes” et le docteur Karma, un vieux de la vieille, qui a une conception très personnelle de sa vocation de médecin. La rencontre entre les deux fait des étincelles, mais c’est bien le choeur des patientes qui continuera à donner le la à ce service hospitalier où l’action se déroule.

Photo : Martin Winkler

Mais si aujourd’hui on ne pense plus guère à la longue marche qui a mené les femmes à pratiquer la médecine, cela ne s’est pourtant pas fait sans mal ni rebondissements. Marie-Elisabeth Henneau, membre du comité organisateur du colloque, reviendra sur un des aspects de cette conquête, à travers le rôle des religieuses hospitalières, dont elle esquissera le parcours du XIIIe au XXe siècle. Elle prendra pour exemple la communauté religieuse des augustines qui officièrent à l’hôpital Notre-Dame à la Rose de Lessines, dont le bâtiment est aujourd’hui classé comme patrimoine exceptionnel de Wallonie. Cet hôpital fondé en 1242 a été transformé en musée dans les années 1980 pendant que les services médicaux étaient transférés à Jolimont. Ce très bel établissement fera l’objet d’une visite commentée le samedi 31 janvier. C’est à cette occasion que Marie-Elisabeth Henneau donnera sa conférence intitulée “Femmes vouées au soin du corps et de l’âme : la longue histoire des hospitalières”.

Elle nous explique sa démarche : « J’ai cherché à comprendre comment ces femmes ont acquis des lieux d’enseignement de la médecine, alors uniquement accessibles aux hommes, et comment leur action a pu être reçue par leur entourage. » En effet, les hospitalières auront dû composer en permanence avec plusieurs autorités masculines, notamment les médecins et leurs supérieurs spirituels. « Les médecins ont souvent remis leur pratique en question au nom de leur manque de formation. Les évêques, pour leur part, ont parfois tenté de limiter leur action au contact du monde pour en faire des cloîtrées surtout vouées à la prière. » Mais ces femmes ont maintenu le cap contre vents et marées et sont demeurées fidèles à leur vocation d’origine. L’utilité de leur action leur permettra ainsi de survivre à la Révolution française et de rester pour deux siècles encore au service de la société contemporaine.

Activité physique au féminin

Le samedi 31 janvier sera consacré à la “santé positive”. Le Pr Marc Cloes, du département des sciences de la motricité, animera une conférence interactive intitulée “Activités physiques, représentations et femmes”. « Les participants seront mis à contribution de façon ludique et dynamique », annonce-t-il. Activités pratiques et exposés théoriques s’enchaîneront. Leur objectif est de faire prendre conscience au public que les «représentations à l’égard de l’activité physique sont souvent incomplètes ou erronées ». Or, la femme constitue une cible toute particulière car c’est elle la première victime de la sédentarité de nos sociétés. « Les femmes sont défavorisées sur le plan de l’activité physique. Tout au long de leur vie, elles développent des attitudes négatives. » Cela commence dès la petite enfance : pendant que le frère frappe dans un ballon, la soeur joue dans le bac à sable. L’exemple maternel est aussi essentiel pour un développement physique équilibré. Si la mère pratique une activité physique, alors la fille sera amenée à reproduire cette habitude. L’école, en outre, ne contribue pas toujours à lui donner une vision positive du sport. « Ainsi, il faut intervenir sur la formation des éducateurs physiques pour qu’ils proposent des activités appropriées aux filles », car le constat est bel et bien là : vers 13-14 ans, on observe un taux d’abandon massif de la pratique des filles.

 

Université d’hiver : Femmes et santé

Organisée par le FER ULg et l’Embarcadère du savoir, du 27 au 31 janvier, à l’Embarcadère du savoir,
Institut de zoologie, quai Edouard Van Beneden 22, 4020 Liège.

Contacts : courriel mehenneau@ulg.ac.be, informations et programme sur http://femmes-sante.be

 

A votre avis : Etre gynécologue, aujourd’hui ?

NervoPatriciaLe métier de gynécologue a beaucoup changé au cours de ces dernières années et évolue vers une prise en charge plus globale de la femme, médicale et psychologique essentiellement. L’objectif étant de favoriser son épanouissement, à toutes les étapes de sa vie et dans le respect de ses aspirations. J’observe aussi que notre patientèle s’élargit : elle est à la fois plus jeune (je reçois des jeunes filles de 13-14 ans maintenant) et plus âgée (même après la ménopause, les femmes nous consultent encore). La contraception s’est beaucoup diversifiée afin de rencontrer aux mieux les attentes des femmes : à côté de la pilule plus finement dosée, se développent aussi les stérilets, les anneaux vaginaux, les implants, les patchs. Le but étant de faciliter la prise d’une contraception adaptée et bien assumée. La technologie de la fécondation in vitro (FIV) a progressé et l’accompagnement des couples – dont des couples d’homosexuelles – est mieux organisé. L’interruption volontaire de grossesse est également très suivi; des structures spécifiques accueillent les femmes et répondent à leurs attentes en proposant, lorsque c’est possible, une IVG médicamenteuse.

Surtout, la chirurgie a évolué vers des techniques minimales, de moins en moins invasives. Dans ma pratique au CHU-Notre-Dame des Bruyères, j’effectue environ 250 opérations par an et je dispose maintenant d’instruments de plus en performants pour réaliser des actes chirurgicaux (kystes ovariens, fibromes, etc.) sans délabrement tissulaire et favorisant une convalescence rapide. La technique de l’endoscopie, désormais parfaitement au point, est aussi utilisée avec succès dans le traitement des cancers.

Dernière remarque : la profession de gynécologue se féminise et je vois que les patientes plébiscitent cette évolution car les femmes se sentent plus à l’aise pour évoquer leur intimité. Entre nous, la confidentialité paraît plus naturelle.

Patricia Nervo
(médecine 1994, gynécologie 1999),
gynécologue au CHU-Notre-Dame des Bruyères

Ariane Luppens
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