January 2015 /240

Mauvaise année

la chronique

DupuisHenriLa chronique de Henri Dupuis

Ce n’est pas cele que je vous souhaite, au contraire. Mais celle qui vient de s’écouler, du moins en ce qui concerne l’attribution des ERC Starting Grants. Les résultats 2014, publiés peu avant la trêve hivernale, n’ont en effet guère été favorables à la recherche de la Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB), ni même à la recherche belge. Le pays ne décroche en effet que neuf des 328 bourses attribuées par le Conseil européen de la recherche à des jeunes chercheurs dont l’excellence scientifique (ainsi que celle du projet défendu) est ainsi reconnue internationalement. Une performance que l’on pourra comparer à celle de pays comme les Pays-Bas (34 bourses), Israël (27) ou même le “petit” Danemark (11).

Mais ces chiffres cachent deux autres déséquilibres, plus inquiétants s’ils devaient se répéter. Le premier est la fracture entre les deux communautés du pays : huit des neuf projets belges récompensés sont portés par les universités flamandes, le seul projet francophone étant à mettre à l’actif de l’ULB. Un résultat qui n’est clairement pas dans la ligne de ceux engrangés les années précédentes, lors desquelles les chercheurs de la FWB (et singulièrement ceux de l’ULg) se défendaient plus que bien.

Le second déséquilibre est plus troublant. Les projets soutenus par l’ERC sont répartis en trois catégories : les sciences de la vie, les sciences sociales et le groupe des “sciences dures” (physical sciences & engineering, selon l’appellation officielle). Or la Belgique est le seul pays, parmi ceux qui ont décroché au moins trois bourses, à n’en avoir aucune dans cette dernière catégorie. Et à avoir deux tiers de ses bourses dans les sciences sociales. N’est-ce là que la traduction mécanique de l’absence de chercheurs francophones, traditionnellement plus en pointe dans la catégorie “sciences dures” ? Peut-être. Ou est-ce le reflet d’un désintéressement toujours présent des jeunes pour ces matières ? Ou, plus préoccupant, d’une désindustrialisation toujours croissante ? Désindustrialisation des esprits avant tout, qui s’accompagne de l’idée que le progrès aujourd’hui (pour autant que cette notion même soit encore acceptée !) ne peut être que social, bien davantage que technologique. Mais un pays, une région peuventils construire leur avenir en s’en remettant aux autres pour ce qui devrait constituer la base de leur développement économique de demain ?

Cela n’est peut-être qu’un hasard, un épiphénomène dont on sourira fin de cette année 2015 lorsque seront connus les nouveaux lauréats. De quoi alors titrer “bonne année” !

 

Henri Dupuis, journaliste, rédacteur en chef du site Reflexions
|
Egalement dans le n°269
Éric Tamigneaux vient de recevoir le prix ACFAS Denise-Barbeau
D'un slogan à l'autre
Résultats de l'enquête auprès de "primo-arrivants" en faculté des Sciences
21 questions que se posent les Belges
Le nouveau programme fait la part belle à l’histoire de la cité
Panorama des jobs d'étudiants