Janvier 2015 /240

Les experts à Liège

Les missions de consultance, enjeux de recherche et de développement

Parallèlement à l’enseignement et à la recherche, l’Université, dans sa troisième mission, cultive des échanges avec la société par des activités scientifiques et de valorisation. Ce “service à la communauté” est structuré autour de plusieurs vecteurs : génération de la propriété intellectuelle, implication dans le développement régional, valorisation des résultats de recherche, formations continues et montage de collaborations avec d’autres acteurs économiques. Ce dernier axe, en ce qui concerne plus particulièrement les missions d’expertise auprès des entreprises ou des services publics, a généré un chiffre d’affaires de 33,8 millions d’euros pour l’année 2013.

Distance critique

« A côté des gros laboratoires connus comme le CSL, le CEM, le Cedia, le Giga, la soufflerie aérodynamique, le laboratoire d’hydraulique des constructions ou celui d’essais au feu, d’autres départementsproposent également des prestations spécifiques », note Olivier Gillieaux, Technology Transfer Officer à l’Interface Entreprises-Université, le service interne mis en place pour favoriser les collaborations entre les entreprises et les laboratoires. « Notre Université est à la base et à la pointe de la recherche fondamentale, dans de multiples domaines. Grâce à certaines aides de la Région wallonne, nous avons également la possibilité d’aider au développement d’entreprises et donc de créer de l’activité économique. Et, en matière d’emploi, nous donnons aussi la possibilité à certaines sociétés de juger de la qualité de la formation de nos étudiants lors de stages et travaux de fin d’études en entreprise. Ces activités conduisent également à un éventuel contrat d’embauche. »

Si le coût des prestations fournies aux entreprises est parfois un peu plus intéressant, financièrement parlant, il contrebalance le fait que les prestataires de notre communauté scientifique restent avant tout dans un esprit universitaire et ne sont pas entièrement dédiés à l’activité de l’entreprise (ce qui se marque dans les délais ou la disponibilité). « Je présente toujours le service en tant que tel, confirme Catherine Fallon, directrice du groupe de recherche Spiral au département de science politique et peu encline à la sujétion. J’aide des entités dans leurs démarches mais, dans le même temps, je collecte des informations pour nourrir mon travail scientifique. On fait du terrain, en somme, tout en conservant une distance critique que recherchent aussi nos clients. »

Ses missions consistent principalement à analyser et à évaluer des politiques publiques pour l’administration, telles que l’organisation des plans de cohésion sociale dans les communes wallonnes ou l’impact du nouveau décret de 2008 sur les services de lecture publique. « On en fait deux ou trois de ce type par an pour les Régions wallonne et bruxelloise, la Fédération Wallonie-Bruxelles ou des agences publiques, explique notre interlocutrice. En un an, cela représente entre 120 000 et 150 000 euros, soit en moyenne l’emploi de deux chercheurs. »

Un niveau comparable avec celui du Pr Moreno Galleni, au Centre d’ingénierie des protéines, où les collaborations avec des entreprises belges et internationales ramènent l’équivalent financier de deux temps-plein et occupent un employé payé en fonds propres pour, notamment, gérer la plateforme technologique Protein Factory du centre. « On nous demande de produire et de purifier les protéines, d’en caractériser les propriétés. C’est grâce à des projets de recherche financés par la Région wallonne et la Communauté européenne – et parrainés par des industriels intéressés par la valorisation de nos résultats – que nous développons notre expertise et nos activités de service », résume Moreno Galleni.

D’autres services oeuvrent plus directement à l’amélioration de notre quotidien : c’est le cas de l’unité du HECE (Hydraulics in Environmental and Civil Engineering) du Pr Michel Pirotton. Avec le Pr Jacqueline Lecomte, des actions d’expertise sont par exemple menées auprès de la SWDE, l’entreprise publique de distribution d’eau potable, pour étudier la possibilité de réduire la quantité d’énergie nécessaire au fonctionnement des réseaux, voire récupérer en certains points une énergie excédentaire pour produire de l’électricité. « Notre unité fonctionne beaucoup avec des clients étrangers, de grands bureaux d’études, des constructeurs de barrages ou des industriels dans le secteur de l’hydraulique ou de l’hydroélectricité, en proposant des approches numériques et expérimentales », détaille Michel Pirotton.

Quatrième mission

Lorsque la demande de prestations se fait récurrente (et que le marché est présent), l’externalisation de l’activité peut séduire certains services, ce qui débouche alors sur la création de spin-offs. L’ULg compte à son actif une centaine de spin-offs et la liste s’allonge, à l’instar de Pragmagora, la société de consultance en entreprise du Pr Jean-François Leroy, engendrée il y a dix ans au sein de la faculté de Psychologie, ou encore TAIPRO Engineering, née en 2009 d’une activité annexe de packaging et de micro-assemblage de microsystèmes à la faculté des Sciences appliquées. Peut-être faut-il y voir la quatrième mission de l’université : favoriser l’émancipation personnelle et la réalisation de soi.

Fabrice Terlonge
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