May 2015 /244

Dépolluer les sols

Nanomicro rassemble universitaires et industriels

On l’ignore souvent mais il faut des milliers d’années pour produire quelques centimètres de sol. Il s’agit par conséquent d’une matière “non renouvelable”. Les sols abritent de nombreuses espèces, des micro-organismes aux insectes et animaux, et pourtant ce milieu particulièrement riche a été sévèrement dégradé par les activités humaines. Les industries, notamment, polluent les sols avec des substances telles que des métaux lourds, des hydrocarbures ou différents solvants. Face à ce constat et à la nécessité impérieuse de résorber les dommages, des initiatives ont été prises en Europe, et cela à tous les niveaux de pouvoir. Ainsi, en Wallonie, le dernier décret en date relatif à la gestion des sols a été adopté en 2008 et vise à mettre en place les bases pour un traitement harmonisé de tous les sols potentiellement pollués, sans se limiter comme auparavant aux dépotoirs et aux stations-service. Si l’initiative est louable, elle ne résout pas encore la principale difficulté : comment dépolluer les sols ? Par quelles techniques ?
DepollutionDesSolsLe projet “Nanomicro”, dans le Pôle Greenwin du Plan Marshall 2.vert, participe à l’avancée de la recherche dans cette matière. Il est le fruit d’un partenariat entre des industriels (les sociétés Sanifox et Artechno) et l’ULg au travers du Centre wallon de biologie industrielle (CWBI) et du département de chimie appliquée, nanomatériaux, catalyse, électrochimie (NCE). Le projet qui s’étale sur quatre ans vise à approfondir les techniques de bioremédiation, c’est-à-dire l’emploi de procédés biologiques (micro-organismes notamment) pour éliminer les polluants industriels présents dans le sol. La bioremédiation concentre en effet de nombreux avantages : coûts réduits, pas de nécessité d’excavation des sols ou de moyens logistiques lourds, efficacité sur les polluants volatils résiduels et les hydrocarbures particulièrement récalcitrants. Avec un inconvénient : c’est un procédé relativement lent, qui nécessite plusieurs mois de traitement. « Sanifox était à la recherche d’une souche bactérienne pour augmenter la vitesse de dégradation de polluants carbonés dans les sols. Cela a donné le projet Nanomicro. À terme, nous aimerions mettre au point une formulation conjuguant les microorganismes et les nanoparticules qui puisse être utilisée dans le cadre de chantiers difficiles à traiter », explique Stéphanie Lambert-Jamoulle, chercheuse qualifiée FRS-FNRS et chargée de cours adjoint au sein du groupe de recherche NCE.
La particularité du projet repose sur le choix de la souche de micro-organismes et l’utilisation originale des nanoparticules pour améliorer leurs performances. Les recherches du volet biotechnologique sont prises en charge par Artechno et le CWBI en vue de multiplier les micro-organismes et d’optimiser leurs potentialités de biodégradation dans les sols pollués. Quant aux nanoparticules, elles présentent ici la spécificité d’être encapsulées, c’est-à-dire qu’« elles sont elles-mêmes mises dans une autre matrice, inerte. Elles sont donc protégées et vont stimuler les micro-organismes, les aider à utiliser comme nutriments les polluants présents dans le sol ».
Cette méthode ne correspond pas au procédé classique qui consiste en l’injection directe de nanoparticules métalliques dans le sol. Au départ, le projet Nanomicro devait se concentrer sur les hydrocarbures aromatiques, très répandus et donc porteurs commercialement. Cependant, les résultats obtenus se sont révélés surprenants puisque la technique s’est révélée également efficace dans la dégradation d’autres familles de contaminants. « Nous continuons donc à travailler sur ce nouveau volet, car il y a des opportunités pour un produit qui contiendrait des micro-organismes et des nanoparticules dans la perspective de l’amélioration de la vitesse et du rendement de dégradation des hydrocarbures aromatiques pour la société Sanifox », conclut Stéphanie Lambert-Jamoulle.

article complet sur www.reflexions.ulg.ac.be
(rubrique Technologie/chimie appliquée)

Ariane Luppens
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