September 2015 /246

Plus vrai que nature

Des mannequins high tech en faculté de Médecine

Vincenzo a tout d’un homme, mais il peut rapidement se transformer en femme. Il vit sa vie allongé et ne craint pas les escarres. Et si l’on entend battre un coeur sous sa poitrine à la peau glabre, il est par contre totalement incapable de sentiments. Mais de lui, on dira qu’il a une extraordinaire capacité de résilience. Vincenzo ? C’est le nom facétieux donné au mannequin du tout nouveau centre de simulation en faculté de Médecine (c’est aussi le prénom de l’actuel doyen de la Faculté, le Pr D’Orio).

Simulations encadrées

MannequinEn novembre 2013, l’ULg et le CHU de Liège organisaient une session de formation dédiée à la simulation dans les pratiques de soins sur mannequin “haute-fidélité”. Inédit en Belgique, le cours spécial rassemblait l’expertise de différents centres de simulation de réputation internationale et l’expérience multidisciplinaire d’instructeurs (médecins, infirmières, pédagogues et psychologues) conjuguant théorie et pratique. L’objectif était alors de former des instructeurs capables de créer et d’animer, à leur tour, des séances de simulation sur mannequin à destination du personnel soignant liégeois. La chose a été rendue possible en mars dernier après l’achat d’un mannequin idoine résultant d’un investissement dépassant les 200 000 euros ainsi que de l’aménagement de locaux afférents dans la tour 4 du CHU. Fruits d’une collaboration entre le service des urgences, celui d’anesthésie-réanimation et de la Faculté, les travaux ont duré un an et laissent la possibilité d’installer ultérieurement deux autres mannequins. L’heureux élu cligne des yeux, peut avoir les lèvres cyanosées et a toutes ses dents. Sous sa peau en silicone, un réseau de fils, de capteurs et de tuyaux recrée les bruits du corps mais a aussi pour fonction de jauger l’efficacité de certains actes médicaux réalisés par l’équipe à laquelle il est confié. instructeurs, qui dirigent et analysent tout derrière une vitre en cabine, de lui donner de la voix par micro. Bref, s’il ne sait pas spontanément vibrionner, Vincenzo ressemble étrangement à un être humain. « Des électriciens ont eu un coup de frayeur en passant à côté en pensant qu’un cadavre traînait dans le local, se souvient Ludivine Counasse, adjointe à la direction administrative de la faculté de Médecine qui a piloté le projet. Plus sérieusement, il est actuellement destiné aux étudiants de master de spécialisation en anesthésie-réanimation et médecine d’urgence mais aussi au personnel infirmier dans le cadre d’une formation continuée. Et pour les assistants en pédiatrie, un mannequin bébé et enfant est à leur disposition sur le site du CHU Notre-Dame des Bruyères. »

Étude en situation presque réelle

Le mannequin a les mêmes réactions physiologiques qu’un patient et on peut même lui injecter des produits. Des groupes mixtes médecins infirmiers de quatre à cinq membres ne se connaissant généralement pas sont confrontés à un scénario catastrophe. « Tout reste confidentiel. C’est un peu stressant car ils ont peur de se tromper ; ce qui arrive souvent. Toutefois, il ne s’agit pas de problèmes de compétences mais plutôt d’erreurs de communication », insiste Julie Jastrowicz, l’un des médecins de l’équipe de formateurs du jour avec Benoît Cardos et Romain Betz (co-responsable avec Claude Hallet). Après une demi-heure de mise en place et un petit briefing, l’équipe médicale du jour est mise à l’épreuve et filmée sur base d’un scénario d’une quinzaine de minutes avant un débriefing de trois quarts d’heure. « Ici, on va simuler un accident sur la voie publique. Une personne présentant des fractures a été amenée en ambulance et son état va se détériorer au niveau respiratoire. La difficulté sera de trouver la cause de la dégradation et d’agir efficacement, de concert. L’objectif est de les faire sortir les étudiants de leur zone de confort », explique le Dr Jastrowicz.
Autour du patient en silicone, deux assistantes en formation, respectivement en médecine d’urgence et en anesthésie-réanimation, une infirmière “salle d’op” et une autre des urgences. Après quelques minutes, le patient sera victime d’un arrêt du coeur qui nécessitera un massage cardiaque et une respiration artificielle. C’était un pneumothorax ; les filles n’ont pas été dupes. « La dynamique est bonne, c’est calme et elles communiquent bien », relève l’un des formateurs. Mais, au débriefing, il apparaît qu’un petit problème de leadership est survenu au sein de l’équipe. « Et pour ce qui est du massage, vous pouviez y aller encore plus fort », ajoute-t-on avant de lui rappeler qu’il s’agit de masser au rythme de… Stayin’ Alive, la célèbre chanson des Bee Gees.

Fabrice Terlonge
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