Janvier 2016 /250

Nutrition clinique

La médecine regarde dans votre assiette

La frontière est mince et pourtant existante : la diététique et la nutrition, ce n’est pas “bonnet blanc et blanc bonnet” ! Si la première se définit comme la science de l’alimentation équilibrée, « la nutrition est celle qui concerne les rapports entre la nourriture et la santé », précise d’emblée Nicolas Paquot, chargé de cours et chef du service associé en diabétologie, nutrition et maladies métaboliques au CHU de Liège.

En Belgique, la formation de diététicien est dispensée, en trois ans, dans les Hautes Écoles et sanctionnée par un diplôme. La profession de diététicien est ainsi reconnue et protégée, ce qui n’est pas le cas du “nutritionniste”. Les dérives sont dès lors fréquentes. « Des formations de type universitaire existent depuis longtemps en France, mais rien de tel n’était organisé en Fédération Wallonie-Bruxelles, confie Nicolas Paquot. Une lacune comblée désormais puisque un “certificat interuniversitaire en nutrition clinique ” est organisé depuis 2013 par les trois grandes universités du pays. »

Ainsi, la question de la nourriture sort-elle de la sphère privée pour entrer, très clairement, dans le champ de la science. Afin de prévenir et de soigner certaines pathologies, les médecins se penchent sur nos assiettes.

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ENQUÊTE

Il faut dire que quelques récentes enquêtes de santé publique alarment les médecins et les responsables publics : en France, des études ont montré que la prévalence de l’obésité (indice de masse corporelle IMC supérieur à 30 kg/m2), entre 1997 et 2002, a augmenté de 50% dans la région Auvergne-Rhône-Alpes, de 83% dans le nord-est, de 84,6% en région parisienne…
En Belgique, 50% des adultes sont en surpoids (IMC supérieur à 25 kg/m²) et, si l’obésité touchait 10,8% de la population en 1997, elle concerne à présent 13,7% de celle-ci, adolescents et enfants compris. « Or de nombreuses pathologies sont corrélées à l’obésité : le diabète, l’hypertension artérielle, les maladies cardio-vasculaires, certains cancers pour ne citer que les plus fréquentes, précise Nicolas Paquot. Sans oublier que l’espérance de vie pour ces populations est réduite de plusieurs années. »

L’obésité a aussi un coût en termes de santé publique puisque l’absentéisme et l’invalidité sont légion chez ces patients. « Si des aspects génétiques interviennent pour une part significative dans les causes de l’obésité et de la prise de poids abusive, ceux liés à l’environnement – la “malbouffe” et la sédentarité excessive – occupent également une place déterminante et expliquent l’augmentation pondérale dramatique à laquelle on assiste depuis quelques décennies », note le Pr Paquot.

PLAIDOYER

Raison pour laquelle la nutrition s’invite depuis plusieurs années dans les cabinets de consultation des médecins généralistes, souvent démunis face à cette problématique complexe. Il a dès lors paru pertinent de proposer aux médecins une formation appropriée. En 2013, les trois grandes universités de la Fédération Wallonie-Bruxelles ont décidé de proposer un certificat en “nutrition clinique”, avec l’objectif de parfaire les connaissances des médecins quant à la nutrition, dans ses aspects préventif, diagnostique et thérapeutique.

La formule connaît un beau succès : d’habitude réservée à 35 candidats, la 3e édition en cours à l’ULg rassemble actuellement 50 postulants. Si 70% d’entre eux sont des médecins généralistes (dont plusieurs médecins du travail), on note aussi la présence de nombreux spécialistes, tels que des gastro-entérologues, des intensivistes, des endocrinologues, des pédiatres ou encore des gynécologues.

Le programme comporte 135 heures de cours réparties en neuf sessions de deux jours, dispensées en un an. L’ambition de l’équipe organisatrice (les Prs Jean-Paul Thissen de l’UCL, Jean-Charles Preiser de l’ULB et Nicolas Paquot de l’ULg, ainsi que le Dr Anne Boucquiau, fondatrice de la Société belge des médecins nutritionnistes) est de faire appel à une multitude de spécialistes abordant la nutrition sous un angle particulier. Dès lors, des médecins, des vétérinaires, des bio-ingénieurs, des épidémiologistes, des diététiciens et des pharmaciens viennent de faire le point sur les macronutriments, les aliments spécifiques, les maladies inflammatoires de l’intestin, les allergies, la dénutrition, les risques biologiques, etc.

Cette formation, qui allie les aspects théoriques et pratiques, est également interactive : elle favorise les échanges avec les enseignants et entre les participants dont le point commun est la nutrition. Inutile de préciser que, chaque année, le programme est adapté en fonction des remarques des participants.

Pour les inscriptions relatives au certificat en 2016-2017, voir les sites www.ulg.ac.be/formationcontinue et www.formation-nutrition.be

PaquotNicolasSi vous deviez citer trois découvertes scientifiques :

  1. La découverte de l’insuline en 1921, pour son impact majeur, puisque avant cette découverte les personnes diabétiques décédaient.

  2. La découverte de la leptine en 1994 qui permit de mettre en évidence le rôle majeur du tissu adipeux en physiologie et physiopathologie humaine.

  3. Le principe de la vaccination énoncé par Pasteur en 1881 : cela paraît évident compte tenu du progrès décisif que la vaccination a apporté en médecine (même si certains en contestent actuellement l’usage et même l’utilité).
Patricia Janssens
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