February 2016 /251

Vaches maigres

Détecter le déficit en cholestérol chez la race Holstein

VacheLe déficit en cholestérol cause la mort précoce des veaux chez les vaches Holstein. Pour éviter qu’un nombre croissant d’animaux soient atteints de cette pathologie, il faut détecter les porteurs de la mutation qui en est responsable et éviter de les utiliser pour la reproduction. L’équipe de Carole Charlier a identifié cette mutation et a mis au point un test pour découvrir les individus porteurs. « Le déficit en cholestérol, appelé CDH pour “cholesterol deficit haplotype” en anglais, est une pathologie qui mène à la mort du veau entre trois semaines et six mois après sa naissance », explique Carole Charlier, chef de projet à l’unité de recherche de génomique animale au Giga de l’ULg. « Les animaux atteints présentent des diarrhées sévères, un fort amaigrissement et une quasi-absence de graisse. Les analyses sanguines montrent en effet une hypolipidémie, notamment un taux de cholestérol très bas. Et il n’y a pas de traitement pour cette affection à ce jour », précise la chercheuse. Sachant que la race Holstein est la race de vache laitière la plus répandue dans le monde, on peut imaginer le désarroi des éleveurs face à cette maladie qui affecte la production du cheptel.

UNIQUE EN EUROPE

« Une équipe allemande a décrit cette maladie et a présenté la localisation de la mutation qui en est responsable lors d’un congrès au mois de juillet. Mais elle ne l’avait pas identifiée », reprend Carole Charlier. Contactée en septembre par des éleveurs de vaches Holstein, son équipe s’est attelée à identifier la mutation responsable du CDH. Pour ce faire, elle disposait d’un outil clé : une base de données reprenant le séquençage de 750 génomes entiers de vaches Holstein. « Cette base de données a été constituée durant ces deux dernières années dans le cadre du projet “Damona” mené par le Pr Michel Georges et financé grâce à un ERC Advanced Grant*», souligne la scientifique. Au départ d’une liste de taureaux reproducteurs susceptibles d’être porteurs de la mutation incriminée, les chercheurs ont mis le doigt sur quatre spécimens faisant partie de la base de données Damona. Ils ont alors analysé le morceau du chromosome 11 où l’équipe allemande avait localisé la mutation en question. « Nous n’avons rien trouvé à cet endroit-là, indique Carole Charlier. Mais à un million de paires de bases de cette localisation se trouve le gène APOB. Or, chez les humains, on sait que la mutation de ce gène provoque des symptômes similaires à ceux observés chez les veaux atteints de CDH », observe-t-elle.

AU COEUR DU GÈNE APOB

En cherchant des mutations classiques dans le gène APOB, Carole Charlier et son équipe n’ont rien remarqué d’anormal. « Par contre, au niveau de l’exon de ce gène, nous avons trouvé une séquence répétée qui fait partie d’une famille de mutations connue sous le nom d’“élément rétroviral endogène ou rétrovirus endogène”. » Les séquences répétées représentent 50% du génome des mammifères. Il en existe différentes classes et sous-catégories, parmi lesquelles on compte les éléments transposables. « L’élément répété trouvé au niveau du gène APOB fait partie de cette dernière catégorie. Il empêche le gène d’être exprimé correctement et a un impact sur sa fonction », ajoute Carole Charlier.

Grâce à la collaboration de la faculté de Médecine vétérinaire de l’ULg, son équipe a pu obtenir l’ADN d’un veau souffrant de CDH. Ainsi, les chercheurs ont eu la confirmation que le gène APOB de ce veau n’engendrait pas une protéine normale. La transcription du gène était interrompue alors que seul 3% de la protéine avait pu être formée. « C’est également ce que l’on observe chez les humains atteints de cette maladie », conclut Carole Charlier. Ces découvertes ont permis aux chercheurs liégeois de développer un test qui interroge de manière directe la mutation. Il permettra dorénavant aux éleveurs d’éviter d’utiliser des animaux porteurs de la mutation pour la reproduction.

article complet sur www.reflexions.ulg.ac.be
(Vivant/médecine vétérinaire)


* Informations sur www.ulg.ac.be/ercmichel-georges

Audrey Binet
Photo : Flickr-CC BY-NC
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