Something Precious

Depuis bientôt quatre ans, le Musée en plein air du Sart-Tilman invite, par le biais de son cycle “Artistes à l’hôpital” dirigé par Julie Bawin, des artistes à exposer et intégrer leur travail au sein du CHU, offrant ainsi un moment d’évasion aux visiteurs, aux patients et au personnel soignant. Cette année ne fait pas exception, et c’est la Liégeoise Sophie Langohr qui a été choisie pour “reprendre le collier”. Il faut dire que l’artiste n’en est pas à son coup d’essai : ayant déjà collaboré avec plusieurs galeries et musées – dont une première exposition avec le Musée en plein air, Out of Paradise, en 2010 –, elle expose encore très régulièrement tant en Belgique qu’à l’étranger où elle jouit d’un bel accueil et d’une reconnaissance unanime du public, cristallisés par de nombreux prix et récompenses.

Adepte du travail de photographie et d’infographie, Sophie Langohr a développé, depuis le début des années 2000, un panthéon de figures “retouchées”, directement puisées dans le monde publicitaire, puis croisées avec des artefacts historiques (projets Drapery, New Faces). Sous ses mains, une sculpture mariale vieille de plusieurs siècles subit ainsi un lifting numérique et se transforme en une égérie du show-bizz aux traits parfaits. La mise en scène est bluffante de réalisme, induisant une sensation étrange chez le spectateur qui interroge alors les canons du beau, du sublime et du précieux actuels. Ce jeu entre le corps et son image, entre ce que l’on voit et ce que l’on choisit de taire, l’artiste en a fait sa spécialité.

Pour cette exposition à l’hôpital du Sart-Tilman, c’est toujours en se jouant des codes virtuels que Sophie Langohr a réalisé deux séries artistiques qui s’intègrent au complexe de l’architecte Vandenhove. La première d’entre elles recense une trentaine de photographies qui se réapproprient des images de joaillerie de luxe en les décomposant et les modelant en formes brutes et sensuelles, organiques ou minérales. Pour la seconde, l’artiste, au Grand Curtius, a dépouillé plusieurs Vierges sculptées de leurs atours en les reproduisant par moulage intérieur : c’est bien le creux épargné dans la statue qui est alors représenté “en plein” ! Une fois encore, les formes, interpellantes, dévoilent l’invisible, le caché.

« Sophie Langohr renverse le pouvoir de séduction de la riche et sensuelle iconographie chrétienne, puisque ces images abstraites rayonnent, non pas depuis ce qui est façonné pour nous émerveiller, mais depuis ce qui existe dans la réalité la plus triviale », souligne Julie Bawin, commissaire de l’exposition.


Voir aussi www.culture.ulg.ac.be/Sophielangohr