Juin 2017 /265

Cockerill 200 ans

Fleuron industriel de la région liégeoise, l’entreprise Cockerill a fait les beaux jours de la Wallonie dès le XIXe siècle et hissé notre territoire au rang de deuxième puissance économique mondiale. À l’occasion de l’exposition qui retrace les 200 ans de l’entreprise, la parole est donnée à François Pasquasy, ingénieur civil métallurgiste (1964), collaborateur scientifique au Centre d’histoire et des techniques (CHST), et à Anne Stelmes, responsable des collections à la Maison de la métallurgie et de l’industrie liégeoise (MMIL), commissaire scientifique de l’exposition au musée de la Boverie.

Le 15e jour du mois : Qui était John Cockerill ?

PasquasyFrancoisFrançois Pasquasy : John Cockerill est indéniablement un acteur majeur de la révolution industrielle. Avec son frère Charles James, il achète en 1817 la résidence d’été des princes-évêques, à Seraing, idéalement située près des mines de charbon et près de la Meuse. John Cockerill s’intéresse à la machine à vapeur dont il pressent l’importance et, pour la produire, il crée la première entreprise “intégrée” qui va de l’extraction du charbon aux laminoirs et à la construction de machines. Dès 1835, alors que la Belgique inaugure la première ligne de chemin de fer sur le continent européen entre Bruxelles et Malines, les usines Cockerill fabriquent les locomotives et les rails qui seront vendus dans l’Europe entière.
John Cockerill était un entrepreneur de premier plan, un visionnaire et un excellent mécanicien… mais ce n’était pas un gestionnaire. En 1840, la société qui employait déjà près de 3000 ouvriers est proche de la faillite. Heureusement, son successeur Gustave Pastor, bras droit du père de la sidérurgie dans le bassin de Liège, redressa l’affaire avec le soutien du gouvernement belge.

Le 15e jour : Une succession en forme de success story…

F.P. : Gustave Pastor a non seulement été un gestionnaire avisé, il a aussi été le premier à introduire dans l’usine le procédé “Bessemer” qui permet la transformation de la fonte en acier. On peut dire qu’il est à la base de la deuxième révolution industrielle en Belgique qui a fait du groupe une entreprise extrêmement florissante jusqu’en 1914. Toute l’histoire de Cockerill est émaillée de belles réalisations dues à de grands patrons.
Aujourd’hui encore, Bernard Serin, aux commandes de CMI, s’inscrit dans la lignée de ses illustres prédécesseurs : en construisant des centrales thermo-solaires dans le désert d’Afrique du Sud, par exemple, il prouve que l’entreprise est toujours à la pointe de la technologie industrielle et répond aux défis environnementaux de demain.

François Pasquasy, La sidérurgie au pays de Liège. Vingt siècles de technologie, Société des bibliophiles liégeois, mars 2017.

Le 15e jour du mois : L’ULg participe à l’exposition ?

StelmesAnneAnne Stelmes : Effectivement. La MMIL est propriétaire des archives de John Cockerill. Au fil des années et des remaniements, la plupart des documents et des artefacts du XIXe siècle lui ont été offerts. La bibliothèque et les images des débuts de la société (cartes postales, plaques de verre, portefeuille de plans) ont été confiés au CHST. Si le musée a collaboré à la conception et à la réalisation de l’exposition avec CMI, Arnaud Peeters et Olivier Defêchereux du CHST ont participé à la réalisation d’une carte interactive sur l’évolution du paysage industriel de la région liégeoise. Par ailleurs, à la demande de CMI, nous avons fait appel aux témoignages et recueilli plus de 2000 réponses sous forme d’objets, de courriers, de cartes postales, etc. Nous avons également réalisé quelques interviews de témoins emblématiques, lesquelles seront présentées à la Boverie.

Le 15e jour : Comment avez-vous conçu l’exposition ?

A.S. : Elle est à la fois historique quand elle présente les origines de l’entreprise et son essor et scientifique puisque de très nombreux objets, outils et maquettes donneront à voir les progrès technologiques réalisés au cours des deux derniers siècles. L’exposition fera la part belle aux nouvelles technologies (bornes interactives, réalité augmentée, 3D, etc.) afin d’immerger véritablement le visiteur dans le monde de l’industrie.
L’ambition est aussi de montrer que le savoir-faire liégeois en la matière est toujours très réputé : ArcelorMittal vient de lancer une ligne de revêtement sous vide de l’acier, une première mondiale encore, réussie grâce au développement de la “sidérurgie à froid” à Seraing qui permet des productions à haute valeur ajoutée.

John Cockerill, 200 ans d’avenir

Exposition au musée de la Boverie, du 2 juin au 17 septembre, parc de la Boverie, 4020 Liège. Visites guidées par Art&fact.

* informations sur www.cockerill200.com

 



Propos recueillis par Patricia Janssens
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