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Guérir de l’arthrose grâce au champignon de Paris
17/11/2015

Partant de là, l’objectif de l’étude menée par Frédéric Oprenyeszk et par l’équipe de l’UROC était de tenter de régénérer cette « huile », de lui apporter les éléments nécessaires à sa reconstitution. Pour ce faire, il fallait mettre au point un gel qui allait se substituer au fluide synovial naturellement présent dans les articulations. Cela a donné des micro-billes, à base de chitosan végétal.

Le chitosan est un glycosaminoglycane riche en glucosamine. Ses propriétés sont remarquables : il  est un composé aérostatique et bioadhésif ce qui fait qu’il peut se « coller » à d’autres tissus. Cela étant il existe deux types de chitosan : animal et végétal. Le premier est le plus répandu commercialement. Il provient de la carapace de crustacés tels que les crevettes ou les calmars(4). Moins répandu, le chitosan végétal s’obtient à partir du pied du champignon de Paris, soit une source des plus accessibles ! Ce n’est pas un hasard si ce dernier a été privilégié à Liège. « Premièrement, explique le professeur Henrotin, c’est une manière de se différencier de ce qui se fait déjà en majorité. Deuxièmement, c’est hypoallergénique, le chitosan végétal ne contient pas de contaminants qui pourraient provoquer des réactions inflammatoires ou infectieuses au sein de l’articulation. Enfin, la source est beaucoup plus accessible, intarissable même. Nous ne sommes plus confrontés aux contraintes liées à l’extraction de chitosan de crustacés qui ne permet pas d’atteindre des niveaux de pureté extraordinaires». Last but not least, l’un des seuls producteurs de chitosan végétal au monde, KitoZyme, est situé à Liège (ses activités biomédicales ont été transférées vers Synolyne Pharma, spin off de l’Université de Liège). Il s’agissait dès lors de profiter de cette opportunité et de créer une interaction entre monde académique et monde industriel. Cela a parfaitement réussi(5).

Mises en contact avec le chitosan, les cellules malades sont soignées

Mais revenons au cœur de la recherche in vitro effectuée par Frédéric Oprenyeszk. Il s’est appuyé sur un procédé breveté par l’UROC: une matrice composée d’alginate et enrichie de chitosan dans laquelle des chondrocytes humains, c’est-à-dire des cellules malades provenant du cartilage en l’occurrence, ont été encapsulées. Le mélange entre alginate et chitosan forme des billes dans lesquelles les cellules malades ont été mises en culture pendant 28 jours soit dans des billes seulement composées d’alginate soit dans des billes d’alginate et de chitosan. Cela afin de démontrer la valeur ajoutée du chitosan. Frédéric Oprenyeszk détaille concrètement le procédé utilisé : « Nous avons déclenché un processus de digestion du cartilage avec l’aide d’enzymes qui viennent « casser » le cartilage et libérer les cellules. Celles-ci ont été mariées au mélange alginate chitosan et le mélange a ensuite été incorporé dans une solution qui permet de gélifier l’ensemble, d’avoir des composites incorporés dans des billes d’alginate chitosan ». C’est ce procédé qui a été breveté. « Nous sommes les premiers à pouvoir créer des billes de chitosan dans lesquelles les cellules peuvent être introduites et mises en contact avec les molécules de chitosan. »

billes Chitosan alginate

(4) En 2003, on comptait 65 producteurs de chitosan dans le monde environ. La très grosse majorité (93%) d’entre eux produit du chitosan animal. Il s’agit d’un marché en plein essor du fait des applications nombreuses du chitosan. Par exemple, il semblerait que ce soit un « capteur de gras », raison pour laquelle il est vendu sous forme de comprimés pour la perte de poids. Le chitosan peut aussi jouer le rôle de fibres pour améliorer la digestion, de conservateur, ou bien encore d’antimicrobien. Les débouchés industriels ne manquent donc pas.
(5) Synolyne Pharma dispose aujourd’hui de sa propre zone GMP (Good Manufacturing Practices), prélude indispensable aux essais cliniques. L’entreprise est capable de produire en GMP le chitosan, des gels, des hydrogels et des billes de chitosan végétal.

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