Novembre 2008 /178

Musée de la vie wallonne

Après plus de quatre ans de travaux, le Musée de la vie wallonne à Liège a rouvert ses portes en septembre dernier. Les lieux ont changé et la conception muséale a été revue, l’ambition étant de permettre à chacun de se situer en tant que Wallon et citoyen du monde.

 

Commentaires d’André Gob, chargé de cours au département des sciences historiques, et de Françoise Lempereur, maître de conférences au département arts et sciences de la communication, tous deux membres du comité scientifique de rénovation du Musée de la vie wallonne.

 

AndréGob
André Gob

Le 15e jour du mois : Le Musée de la vie wallonne arbore un nouveau look… 

 

André Gob : Oui, le musée adopte maintenant une allure résolument contemporaine, même s’il occupe un bâtiment ancien classé. Le bureau d’architecture de la Province de Liège a convaincu la Commission royale des monuments et sites d’utiliser le verre pour accroître la facilité d’accès aux espaces d’exposition. La nouvelle galerie et la cage d’escalier réalisées avec ce matériau apportent ainsi au musée une parure contemporaine, ce qui contribue au rajeunissement de son image. En tant que membre du conseil scientifique du musée, je me félicite de ce choix, car je pense qu’il est cohérent avec sa nouvelle ambition : refléter la vie des Wallons à partir du XIXe siècle jusqu’à nos jours. Je crois en effet qu’il fallait en finir avec une conception un peu “nostalgique” des années passées : le Musée de la vie wallonne doit refléter l’évolution de notre société ; c’est ainsi qu’il prendra tout son sens. Dans l’ensemble, je pense que cette nouvelle conception qui prévaut au sein de la direction du musée est traduite dans l’exposition.

Le 15e jour : Et d’un point de vue muséographique ?

 

A.G. : La tour de verre de l’accueil et la nouvelle galerie du cloître attirent le regard et l’attention évidemment. Mais ce que le public ignore, c’est que l’ensemble du bâtiment a été doublé par une “seconde peau”, laquelle permet de dissimuler tous les câbles et tuyaux ainsi que de confiner la climatisation loin des vitrines et des visiteurs, ce qui constitue un plus indéniable. Je sais que certains critiquent les vitrines mais pour ma part je les trouve esthétiques ; je me réjouis particulièrement de l’éclairage des pièces qui permet des variations intéressantes tout en évitant les ultraviolets et les infrarouges qui dégagent de la chaleur. 

 

J’ai coutume de dire que, pour saisir la “vie wallonne”, il faut regarder la Batte ! Un simple coup d’œil permet d’appréhender le caractère multiculturel de notre société : cette dimension devait, à l’évidence, être présentée dans le musée puisque c’est le quotidien des gens, bien plus que la langue wallonne par exemple, qui peut servir d’approche à une définition de la “vie wallonne”. 

 

Grâce à la générosité des particuliers et de quelques institutions – le Fonds d’histoire du mouvement wallon fait maintenant partie de l’ensemble –, le musée détient à présent près de 100 000 objets révélateurs de l’art de vivre en Wallonie. C’est dire si les réserves sont pleines et si les idées d’expositions temporaires fourmillent.

 

 

LempereurFrancoise
Françoise Lempereur
   

Le 15e jour du mois : Le Musée de la vie wallonne arbore un nouveau look…

Françoise Lempereur : Effectivement, le lifting du musée est réussi et la rénovation a été le moment de revoir la présentation de ses très riches collections. Pour moi, le musée ne se résume pas à une exposition de centaines d’objets inertes, mais il propose une série d’objets qui témoignent d’une évolution des métiers, des progrès de l’hygiène, de l’évolution des mentalités, des acquis des luttes syndicales, etc. Le Musée de la vie wallonne, s’il n’est pas le porte-drapeau de l’identité wallonne, n’en apporte pas moins des éléments de réflexion.

Ainsi, notre patrimoine immatériel est parfois commun avec celui de nos voisins, la France, la Flandre, l’Allemagne ou le Luxembourg… Nous ne sommes pas pour autant Français, Flamands, Allemands ou Luxembourgeois. Plus fondamentalement, notre société contemporaine repose sur des modes de vie mondialisés, mais nous gardons des spécificités wallonnes. Dans le contexte politique que nous connaissons actuellement, le musée constitue à la fois un repère pour les Wallons et un outil de connaissance pour les étrangers. Même si certains visiteurs m’ont déjà fait part de leur déception de ne plus retrouver autant d’objets liés à la vie locale qu’autrefois, je ne crois pas que ce nouveau musée conduise à une banalisation de notre culture.

Les collections sont structurées autour de cinq thèmes. “Wallonie(s)” évoque la géographie, la langue, l’histoire de la Wallonie ; “Evolution et révolutions techniques” met en scène la vie économique ; “Vivre ensemble” aborde la vie en société, les rites, les fêtes mais aussi les combats syndicaux ; “Jour après jour” s’intéresse à l’espace privé et à l’évolution des mentalités. Le dernier espace “Vie de l’esprit” parle de l’éducation, de l’enseignement mais aussi des croyances religieuses. La démarche veut ainsi échapper au folklore, lequel, à mon sens, fige les choses dans un passé idéalisé, caricaturé. Le nouveau Musée de la vie wallonne a mis l’homme au centre de ses préoccupations. L’homme dans la société wallonne d’hier à aujourd’hui.

Le 15e jour : Comment jugez-vous le contenu ? 

F.L. : L’utilisation des documents photos et audiovisuels du musée est un vrai bonheur. Ces documents apportent une incontestable plus-value à l’ensemble : les images rendent vivants et humanisent les objets appartenant à une époque proche et lointaine à la fois. La ligne du temps constitue aussi un fil rouge permanent. Elle montre l’évolution de la société dans un continuum. De nouvelles données apparaissent inévitablement, comme l’immigration qui a marqué et marque de plus en plus notre région. Ainsi, la société wallonne est métissée et si, par exemple, la religion catholique est un élément fondateur de notre culture, elle n’est plus la seule : aujourd’hui les protestants, musulmans, juifs et laïcs se côtoient dans un même espace. Je pense que le nouveau musée plaira et intéressera davantage de visiteurs, surtout parmi les jeunes générations.

 

Propos recueillis par Patricia Janssens 

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